Le nouveau Service d’Accompagnement à la Rénovation Energétique (SARE) est entré en vigueur dans la Région Grand-Est le 1er janvier 2021. Mais qu’est-ce que c’est ?…
Nouveau, car il se substitue aux traditionnels Espaces Info Energie (EIE), instaurés par l’ADEME en 2000 (eux-mêmes institutionnalisant les conseillers énergie présents dans les associations telles qu’Alter Alsace Energies depuis le début des années 90). Les Espaces Info Energie, qu’Alter Alsace Énergies porte aujourd’hui en collaboration avec les collectivités partenaires, sont des lieux de conseils neutres, indépendants et objectifs sur la rénovation énergétique. Les conseillers ont pour mission d’accompagner les citoyens dans leur réflexion sur l’isolation, les systèmes de chauffage et les énergies renouvelables, tant d’un point de vue financier que technique.
Nouveau, car le mode de financement des conseillers (ex-conseillers info énergie devenus conseillers FAIRE) est modifié. Financés jusqu’alors à 100% par l’argent public, les postes de conseillers sont désormais financés à 50/50 par de l’argent public et privé, en provenance des fournisseurs d’énergie. La moitié du financement provient en effet des CEE, les Certificats d’Economie d’Energie : les fournisseurs d’énergie en France ont des quotas de vente d’énergie. Ils peuvent augmenter ces quotas en les compensant par des CEE, c’est-à-dire en finançant une opération amenant des économies d’énergie. Ainsi on peut demander à un fournisseur d’énergie une aide financière lorsqu’on isole sa maison : l’énergie économisée par l’isolation, financée par le fournisseur, lui permettra de vendre plus d’énergie à ses clients (c’est sur ce principe que sont basées les isolations à 1€). De la même façon, les fournisseurs peuvent financer des programmes générant des économies d’énergie, comme par exemple le SARE.
Nouveau enfin, car le SARE instaure une rémunération à l’acte des conseillers : chaque type d’acte (conseil générique par téléphone, conseil individualisé en rendez-vous, accompagnement global ou encore actes de sensibilisation) doit être compté et justifié pour ouvrir droit au montant de rémunération correspondant défini par l’Etat. C’est la conséquence directe du financement par les CEE, qui nécessite de quantifier les économies d’énergie générées par le service.
Ce SARE, s’il n’est entré en vigueur que cette année 2021 en Grand-Est, était déjà opérationnel depuis le 1er janvier 2020 pour l’ensemble de la France : à charge de chaque Région ensuite de s’en saisir, de conventionner avec les fournisseurs de leur choix pour financer les 50% manquants, et de modeler le Service d’Accompagnement à la Rénovation Energétique tels qu’ils l’entendent sur leur territoire.
En Bretagne, ce service d’accompagnement « public » remanié a déjà pu être testé pendant un an… Et ainsi que de nombreuses structures le craignaient, le service et les conditions de travail des conseillers se sont dégradés, conduisant le réseau des Agences Locales de l’Énergie Bretonnes à se mobiliser pour faire entendre leurs voix auprès des parlementaires et des ministères du logement et de la Transition Énergétique.
Avec la mise en place du SARE en Grand-Est, Alter Alsace Energies s’est efforcée d’assurer la continuité du conseil info énergie sur les territoires où elle œuvrait déjà (Sundgau, St-Louis-3 frontières, Vallée de Kaysersberg, Eurométropole de Strasbourg). Mais accepter une rémunération à l’acte ne correspond pas à notre vision du conseil aux particuliers : le déclenchement d’un projet de rénovation individuel fait souvent suite à de nombreux messages distillés par différentes sources, c’est-à-dire à une animation globale sur le territoire, non ciblée. Et l’accompagnement nécessaire est différent pour chaque projet, chaque personne. Le besoin de quantifier ne correspond à aucune réalité (pas de suivi, pas de sensibilisation sur l’utilisation du logement après rénovation), et invisibilise tout le travail de mobilisation de la population, pourtant essentiel.
Nous nous sommes donc efforcés de porter ce message auprès de nos collectivités partenaires afin de travailler dans un cadre plus large, comptabilisant certes des “actes”, mais laissant aussi la place à la mise en place d’une culture de la rénovation thermique : sensibilisation, permanences régulières des conseillers… Parce qu’on ne peut pas réduire la question humaine du changement de comportement à des principes comptables “d’actes de conseil”.
Audrey Petit
Conseillère info énergie… euh non… conseillère SARE !